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PSEUDONYME-PARTIE

PITIÉ ACHEVEZ-MOI, DIEGO MICHIGAN
LES EDITIONS DE LA SEINE / COLLECTION RAFALE, 1954

A propos de ses polars, Mickey Spillane disait : c'est la première ligne du premier paragraphe qui vend le bouquin. Ce jour-là, il surestimait un tout petit peu son lectorat.
Je sais de quoi je parle, je suis censé représenter le lectorat visé.
Un bouquin (de ce type, s'entend), ça se vend principalement parce qu'une poupée bien pulmonée et joliment illustrée s'affiche fièrement sur la couverture. C'est logique. Toutes ces salades salaces, c'est pour les gonzes qui ont des goûts esthétiques bien fermes et tranchés. Rajoutez un titre qui s'incruste à vie dans le cervelet et vous tenez dans vos petits doigts boudinés et suants un chef-d'œuvre intemporel du gare jetable.
Et tant pis si l'intérieur est rédigé par un tâcheron anonyme fortement anisé.

Bref, je savais pourquoi j'investissais mes maigres euros dans Pitié Achevez-Moi. Pour la couverture. Et pour le titre. Et aussi pour Diego Michigan. Mais cette dernière attention est plus personnelle.
Pour rester dans le Spillane, je dirais que les dernières phrases des derniers paragraphes de Diego Michigan m'ont vendues ses bouquins suivants...
Car Diego Michigan a beau être un cache-misère collectif, un pseudonyme pour auteurs infortunées aux ambitions plus nobles (genre, la poésie, mais on y mange moins bien que dans le polar bas de gamme), il ne faut pas pour autant sous estimer sa prose facile. Ce n'est peut être pas du André Hélena des grands jours, mais c'est tout de même assez proche d'un George Maxwell ronronnant, le George Maxwell de la Sogedide par exemple. Pour dresser le tableau grossièrement, c'est un truc de mec, avec du sang, des tripes et du cul, mais pas trop sauvage quand même, limite édulcoré.
L'analogie culinaire du Hardboiled étant l'œuf dur, il s'agirait donc là d'un œuf mollet : Ce n'est pas de la littérature à la coque pour vieilles filles toquées de mystères policiers ennuyeux et ce n'est pas non plus un sommet de l'extrême cuisson à eau bouillante façon George Maxwell période le Condor, pour rester dans le comparatif.
Pitié Achevez Moi, c'est le juste milieu. C'est du roman d'hommes écrit par un indécrottable romantique aux passions un peu tordues. C'est un roman d'amour violent. Un Arabesque collection Parme mais sans la guimauverie, le sirop et les considérations sophistiquées. Tout ces trucs de nénettes y sont remplacés par des mitraillettes et des grenades, avec un couple à la Bonnie & Clyde qui dézingue tous azimuts, de la torture soft, du sexe suggéré et, chose toujours appréciable, un peu de misogynie par endroits.
"Il était déchaîné et Minou ne pensait qu'à une chose : se protéger des coups. [...] Ne sachant plus où elle était, ni quel homme la frappait, elle gémissait, puis subitement cria :
- Rudy... Je t'en supplie...
Ce prénom fit à Fred l'effet d'une bombe [...]. Il s'acharna, frappant de toutes ses forces sur Minou complètement nue qui, à plat ventre sur le lit, ne bougeait plus que rarement. Quand elle ne bougeat plus du tout, il se laissa tomber sur elle et, comme un primitif qu'il était devenu, il la prit et tout deux sombrèrent dans un plaisir qu'ils avaient ignorés jusqu'alors."
Notons au passage qu'ils sombrent TOUT DEUX dans le plaisir.
Ah, c'est beau l'amour cruel d'hommes virils et violents, n'est ce pas les filles ?



DU VITRIOL SUR SA TOMBE, PETER VIANE
LE TROTTEUR / LES GRANDS ROMANS NOIRS, 1953

Je continue dans le Diego Michigan avec Du Vitriol Sur Sa Tombe. La couverture (d'Alex Pinon, tout de même) est moins jolie, le titre pas autant tapageur mais le roman (signé Peter Viane) est bien meilleur.
Ou alors était-ce une question de perception.
Car Du Vitriol Sur Sa Tombe, je l'ai lu quelques jours après Pitié Achevez-Moi. Et le rapprochement avec Diego Michigan, je l'effectuais une fois le premier tiers du texte passé : il s'agit en effet des même protagonistes, plus jeunes d'un ou deux volumes. Et l'aventure vécue dans Du Vitriol Sur Sa Tombe était relatée rapidement dans Pitié Achevez-Moi.
Vous parlez d'une surprise - surtout connaissant l'éditeur, le 5 rue des Moulins, pas avare en collections particulières pour ses divers feuilletons romancés.
Mais l'élément le plus troublant de ce mic-mac reste cet emploi du double pseudonyme. Je me gratte le crâne et j'avance un début d'explication. On va bien voir si ça colle...

En 1953, Peter Viane signe coup sur coup trois textes pour les éditions du Trotteur. Trois textes qui se suivent, publiés dans la collection Les Grands Romans Noirs : Ça Va Être Ta Fête, Du Vitriol Sur Sa Tombe et Ne Les Tue Pas Tous.
Fin 53 début 54, la censure et George Maxwell aidant, c'est la fermeture du 5 rue des Moulins. Les Editions de La Seine (futur Editions Baudelaire, Bel-Air, Internationnal Pocket et compagnie, bref, des filous spécialisés dans la réédition masquée) récupèrent une partie du catalogue, principalement du Diego Michigan (comme Bagarre à Macao, re-titré La Belle de Macao), et font de ce dernier leur auteur fourre-tout maison pour les manuscrits restants. Dont quelques histoires de truands romantiques signés Peter Viane.
La liste non-confirmée (car pas lus) des Vianes / Michigan : Un Paquet de Bastos, Pitié Achevez-Moi, Le Tueur Sans Mémoire et Arrête Le Cinéma.
Et si vous avez de plus amples informations, n'hésitez pas à me corriger...

Pour le reste, ce que j'écrivais au sujet de Pitié Achevez-Moi est aussi valable mot pour mot pour Du Vitriol Sur Sa Tombe. C'est du bon noir alimentaire qui, de par son mélange de sentimental et de sensationnel, s'élève quelque peu au dessus de l'habituelle production du Trotteur.
Mais j'en parlerais certainement avec plus de détails une fois l'ensemble de la série dégottée et lue.

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